Les critères ESG font évoluer la finance d'entreprise

Alors que l’écologie et le réchauffement climatique sont plus que jamais au cœur des enjeux de transformation des entreprises, les directions financières ont un rôle clé à jouer. Avec la taxonomie verte à l’échelle européenne ou la Loi Energie et Climat en France, les évolutions règlementaires se sont accélérées ces dernières années. Mais les institutions ne sont pas les seules à exiger la production d’une information allant au-delà du prisme financier. Les investisseurs expriment également un besoin accru de reportings extra-financiers.  

Dans ce contexte, les directions financières voient peser sur elles de nouvelles attentes et un nouveau type d’information à orchestrer. DigiDAF vous propose dans cet article un retour sur ces évolutions. 

Environment

1/ Le poids des investisseurs

Le cabinet PwC a publié une étude portant sur les priorités des Directions financières en 2022. D’après celle-ci, 85% des DAF de grands groupes et 65% des DAF de PME et ETI expriment des attentes plus fortes en termes de reportings extra-financiers. Celles-ci viennent prioritairement du management, afin de mesurer l’impact des évolutions stratégiques mises en place, et des investisseurs. 

Mais comment expliquer l’intérêt des investisseurs, traditionnellement très ancrés sur les données financières, pour ce nouveau type de reporting ?  Plusieurs raisons plus ou moins directes permettent d’expliquer cela.  

Tout d’abord, les sociétés d’assurance sont, en Europe, les premiers investisseurs institutionnels dans l’économie. En effet, via le placement de l’épargne de leur clientèle, notamment en assurance-vie en France, les assureurs ont une capacité d’investissement extrêmement importante. Celle-ci était estimée à 10,6 trillions d’euros en 2021. Or, suite aux Accords de Paris, la grande majorité des assureurs s’est engagée d’ici 2030 à ne plus détenir dans leurs portefeuilles d’actifs liés à des entreprises ne possédant pas de plan de décarbonisation de leur activité. Cet engagement suit également la tendance observée auprès des épargnants avec 61% des épargnants prenant en compte les impacts sociétaux et environnementaux dans leurs souhaits d’allocation de leur portefeuille d’investissement (d’après un sondage IFOP pour le FIR et VigeoEiris en 2019). 

Ces deux acteurs (assureurs et épargnants) sont d’ailleurs à l’origine de l’essor de l’Investissement Social et Responsable observé sur la dernière décennie. Outre l’attraction d’investisseurs institutionnels, la production et la communication de reporting extra-financier est également devenue clé pour optimiser la valorisation de votre entreprise. Ceci s’explique à la fois par : 

  • les besoins d’investissements futurs pour permettre à l’entreprise de devenir neutre en carbone : la valeur d’une entreprise sera grevée par le montant des investissements qui seront nécessaires pour permettre la neutralité carbone. Ainsi, démontrer que les moyens ont déjà été mis en place et qu’ils ont un impact sur la neutralité de l’organisation permet aux DAF de négocier à la hausse la valeur de l’entreprise 
  • la valorisation à 360° de l’entreprise qui prend désormais en compte les clients et les employés de l’entreprise cible : comme différentes études ont pu le démontrer ces dernières années, les entreprises à impact positif sont de plus en plus plébiscitées par leurs clients et bénéficie d’un taux de rotation de leurs effectifs moins important. Ainsi démontrer l’impact sociétal positif d’une entreprise permet alors d’accroitre sa « valeur clients » et sa « valeur employés », et donc la valeur globale de l’entreprise. 

Ainsi, les entreprises souhaitant attirer durablement des investisseurs institutionnels, et/ou maximiser la valeur de leur entreprise, doivent donc désormais démontrer leurs engagements sociétaux. 

Mais comment construire ces reportings extra-financiers ? Que doivent-ils contenir ? Quelles sont les contraintes règlementaires ? 

2/ Reportings extra-financiers et contraintes règlementaires 

La difficulté de la conception des reportings extra-financiers réside tout d’abord dans le choix des éléments à y intégrer. Le foisonnement des contraintes réglementaires, notamment sur certains secteurs (financiers, énergie, …), associé à l’absence de définitions claires a complexifié leur mise en place. Sans rechercher dans cet article l’exhaustivité règlementaire, voici quelques repères pour vous aider à sélectionner l’information extra-financière à partager : 

Quelles obligations règlementaires ?  

  • Si votre entreprise a une activité financière/d’investissement, vous pouvez être concernés par les obligations de reporting de l’article 29 de la loi Energie et Climat (1)
  • Le règlement européen de la taxonomie verte, élargissant peu à peu, au cours des exercices prochains, les typologies d’entreprises concernées :  
      • A partir de l’exercice 2023 (publication en 2024) : les institutions financières et les grandes entreprises de plus 500 salariés (avec un bilan supérieur à 20 millions d’euros ou un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions d’euros) soumises à la NFRD (Non-Financial Reporting Directive) 
      • A partir de l’exercice 2024 (publication en 2025) : les grandes entreprises de plus de 500 salariés déjà soumises à la NFRD  
      • A partir de l’exercice 2025 (publication en 2026) : les grandes entreprises non soumises à la NFRD 
      • A partir de l’exercice 2026 (publication en 2027, dérogation possible jusqu’en 2028): les PME cotées en bourse 

Quels types impacts à partager ?  

Les informations extra-financières doivent démontrer l’impact sur un ou plusieurs des trois piliers de l’ESG. Pour rappel, ces piliers sont : 

  • L’environnement.
    Exemples : gestion des déchets, réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation énergétique, prévention durable des risques liés à des catastrophes industrielles, …
     
  • Le social
    Exemples : respect du droit des employés et du dialogue social dans la politique de management, de la parité et du nombre de personnes en situation de handicap, prévention des accidents du travail, formation du personnel, …
     
  • La gouvernance
    Exemples : lutte contre la corruption, respect de la transparence de la rémunération des dirigeants, relation entre les actionnaires, la direction et le conseil d’administration. 
     

Quels indicateurs à produire et communiquer ?  

D’après le règlement de la Taxonomie verte, 3 indicateurs clés sont à fournir : 

  • La part du Chiffre d’Affaires durable sur le Chiffre d’Affaires total 
  • La part du Capex durable sur les Capex totaux 
  • La part des Opex durables sur les Opex totaux 

La durabilité des Capex ou Opex est évaluée sous 3 aspects. Ils sont :  

  • Directement liés à des activités durables ou, 
  • Inclus dans un plan visant à étendre ou rendre une activité durable ou, 
  • Individuellement durables 

Les grandes entreprises devront également publier l’alignement de leurs activités à la taxonomie verte. 

Comment formaliser le reporting ? 

De plus en plus de guides et de modèles sont disponibles pour accompagner les entreprises. On recense notamment ceux publiés par la Commission européenne, la Global Reporting Initiative, le Sustainability Accounting Standards Board ou encore le Climate Disclosure Standards Board.   

Enfin, même si vous n’avez pas encore d’obligation de déclaration, vous pouvez également utiliser la plateforme Impact proposée par le gouvernement. Celle-ci vous permettra de vous familiariser avec les données ESG à communiquer, mais aussi de mesurer dès maintenant l’impact de votre entreprise. 

3/ Le rôle stratégique de la fonction finance 

En amont de la génération des reportings extra-financiers, les enjeux multiples autour des critères ESG nécessitent l’implication des DAF dans la détermination de la stratégie financière à mettre au regard des ambitions sociétales définies par le management.  
Ainsi, il conviendra de définir notamment les investissements à mener pour mettre en place cette stratégie : 

  • Quels sont les outils sur lesquels investir pour collecter l’ensemble des flux de données, les analyser et les retranscrire ? 
  • Quelles sont les équipes à créer et les compétences à acquérir pour définir, chiffrer et communiquer l’impact sociétal de l’entreprise ?  
  • Quels sont les coûts de formation et de conduite du changement associés ?  

De plus, l’entreprise devra adapter sa stratégie de croissance externe et/ou partenariale en ligne avec ses ambitions sociétales. La fonction finance joue donc un rôle central en s’assurant que les flux financiers dédiés à des projets externes répondent bien à cette stratégie de croissance.  

Besoin d’accompagnement pour la mise en place de votre stratégie financière et/ou la création de vos reportings extra-financiers ? Contactez DigiDAF sans plus attendre.

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Sources :
(1) LegiFrance – LOI n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat – 09/11/2019